Le contrat de travail en Suisse : tout savoir sur le Code des Obligations et la CCT
Le droit portant sur les contrat de travail suisses régit les rapports entre employeurs et salariés pour ceux qui souhaitent travailler en suisse. Plus flexible et moins contraignant que les contrats de ses voisins (notamment la France), il est essentiel de connaître les spécificités du droit du travail suisse pour toute personne s'apprêtant à travailler dans la Confédération helvétique, qu'elle soit résidente ou frontalière.
Les contrats de travail en Suisse peuvent être à durée déterminée ou indéterminée, mais les contrats sont principalement encadrés par le Code des Obligations (CO). La convention collective de travail (CCT) joue également un rôle important dans la réglementation des conditions du travail, fixant souvent des salaires minimaux et des avantages au-delà de la loi, souvent en faveur des employés.
Ce guide vous donne les clés pour comprendre et négocier votre contrat de travail en toute sérénité en Suisse et réussir votre carrière professionnelle dans un nouvel emploi .
Types de contrats de travail en Suisse
Le droit suisse distingue principalement deux cadres de contrat pour les relations de travail, incluant le Contrat Individuel de Travail, également connu sous le nom de contrat individuel de travail (CIT), et la Convention Collective de Travail (CCT).
1. Le Contrat Individuel de Travail (CIT)
Le contrat individuel de travail est l'accord conclu directement entre l’employeur et le salarié, et il peut nécessiter un permis de travail pour les étrangers . Il est régi par les articles 319 et suivants du Code des Obligations (CO). Le CIT peut être :
Contrat à Durée Indéterminée (CDI) : La forme la plus courante, sans limitation de temps. Il offre la meilleure stabilité d'emploi aux travailleurs et nécessite le respect des longs délais de prévenance après la période d'essai.
Contrat à Durée Déterminée (CDD) : Limité dans le temps en fonction des besoins de l'entreprise. En règle générale, une succession de CDD dans le but de contourner les règles de protection du CDI est considérée comme abusive et peut requalifier le contrat de travail en CDI.
2. La Convention Collective de Travail (CCT)
La CCT est un accord écrit conclu entre des associations d’employeurs ou un employeur individuel et des associations de travailleurs suisses (syndicats), souvent adaptés à chaque branche. Elle est un instrument essentiel du marché de l'emploi et du dialogue social en Suisse. Elle :
Fixe des conditions minimales et notamment le salaire minimum dans les contrats pour les salariés d’une branche ou d’une entreprise (notamment les salaires minimaux, la durée du travail, les vacances et l'obligation du 13e salaire).
Ses dispositions priment sur le CIT si elles sont plus favorables au salarié (principe de faveur).
Elle est souvent rendue obligatoire dans certains secteurs par le Conseil fédéral.
Les contrats de travail en Suisse sont souvent conclus oralement, mais il est vivement recommandé, surtout pour les frontaliers, d'exiger un contrat écrit pour préciser toutes les dispositions de travail et le salaire en francs suisses (CHF).
Attention à ne pas confondre le CTT (contrat-type de travail) avec le CCT :ce sont des actes normatifs promulgués par l'Etat qui règlent les rapports au travail.
Contenu d’un contrat de travail en Suisse
Même si la forme orale est légale, l’employeur suisse est tenu, dans tous les cas, d'informer l’employé par écrit des éléments essentiels du contrat (art. 330b CO). Un contrat de travail en Suisse doit idéalement contenir les dispositions et informations suivantes :
Le nom et l'adresse de l’employeur et du salarié.
La date de début de la relation de travail.
La fonction exacte et la description des tâches (cahier des charges), éléments cruciaux pour une carrière.
Le salaire de base et les éventuels suppléments (primes, 13e salaire), exprimés en francs suisses (CHF).
La durée de travail hebdomadaire (souvent 40 à 42 heures) et le régime de compensation des heures supplémentaires.
Le nombre de jours de congés payés annuels (vacances).
La durée de la période d'essai.
Les employeurs suisses doivent également informer les salariés si une convention collective de travail (CCT) s’applique à leur contrat, en respectant les lois sur le droit du travail . Toute modification importante du contrat de travail (salaire, fonction) nécessite l'accord des deux parties, souvent par un avenant écrit.
Période d’essai et durée de travail en Suisse
Période d'Essai
La période d’essai en Suisse est fixée légalement à un mois (art. 335b CO), mais peut être prolongée par accord écrit des parties jusqu’à trois mois maximum.
Pendant cette période, les délais de résiliation sont beaucoup plus courts (généralement 7 jours pour la fin d'une semaine de travail).
L'objectif est de permettre aux deux parties de vérifier l'adéquation professionnelle et personnelle, une étape clé avant de s'engager sur le long terme.
Durée de Travail et Congés
La durée maximale de travail est fixée par la Loi sur le Travail (LTr), et est généralement plus longue que le temps de travail en France :
45 heures par semaine pour les entreprises industrielles, le personnel de bureau et les cadres techniques.
50 heures par semaine pour les autres travailleurs.
Les heures supplémentaires sont fréquentes et doivent être compensées par du temps libre ou par une majoration de salaire (souvent 25%).
Les salariés ont droit à des congés payés minimum légalement fixé à quatre semaines par année de service (cinq semaines pour les moins de 20 ans).
Convention collective de travail et marché du travail en Suisse
La Convention Collective de Travail (CCT) est un pilier de la régulation du marché suisse, particulièrement pour les travailleurs ressortissants d'autres pays . Elle est souvent plus favorable que la loi, et il est essentiel de savoir si votre employeur y est soumis.
Le marché suisse est caractérisé par des rapports complexes entre les employeurs et les salariés, notamment en matière de négociation.
Une grande flexibilité : Les procédures d'embauche et de licenciement sont généralement moins lourdes qu'en France.
Une faible réglementation légale : De nombreux aspects (13e salaire, primes, retraite) ne sont pas définis par la loi mais par le contrat ou la CCT.
Des salaires élevés : La forte compétitivité et la faible fiscalité indirecte permettent aux salariés des niveaux de rémunération parmi les plus hauts d'Europe, payés en francs suisses (CHF).
Cette flexibilité permet aux salariés d’avoir la possibilité de changer d’emploi facilement et de négocier leurs conditions de travail et leur salaire de manière plus directe, favorisant ainsi la circulation des talents .
Résiliation d’un contrat de travail en Suisse
La résiliation d’un contrat de travail en Suisse obéit à des règles strictes mais relativement simples, régies par le CO.
Délais de Préavis Légaux
La résiliation ordinaire d'un contrat (par l'employeur ou le salarié) doit respecter les délais de préavis fixés par le Code des Obligations (CO), sauf si la CCT ou le CIT prévoit des délais plus longs :
Année de Service | Délai de Préavis (CO) | Conditions de Résiliation |
Pendant l'essai | 7 jours | Pour la fin d'une semaine de travail. |
1ère année de service | 1 mois | Pour la fin d'un mois civil. |
2e à 9e année de service | 2 mois | Pour la fin d'un mois civil. |
À partir de la 10e année | 3 mois | Pour la fin d'un mois civil. |
Cas Spéciaux
Licenciement sans préavis (pour justes motifs) : Très rare et réservé aux fautes graves et immédiates (vol, violation du secret professionnel). Le contrat prend fin immédiatement.
Licenciement abusif : Les salariés ont le droit de contester une résiliation si elle est abusive (ex. : en raison du sexe, de l'âge, d'une grossesse, d'une maladie non fautive). Le licenciement reste valable, mais l'employeur s'expose à une indemnisation pouvant aller jusqu'à six mois de salaire.
La résiliation peut avoir des conséquences sur les droits à l’assurance-chômage si elle est donnée par l'employé travailleur sans nouvel emploi ou pour faute grave (délai de carence).
Droits et obligations des employés en Suisse
Les employés en Suisse bénéficient de droits importants, assortis d'obligations claires pour maintenir l'équilibre du travail contrairement au droit français.
Droit du travail
Droit à une rémunération équitable (salaire en accord avec le contrat et la CCT), payée en francs suisses.
Droit aux vacances et aux pauses régulières (Loi sur le Travail).
Droit à la sécurité et à la santé au travail (l'employeur doit prendre des mesures de protection contre les risques).
Droit de se syndiquer et de participer à des activités syndicales.
Obligations
Obligation de diligence : Faire le travail avec soin, utiliser correctement les outils et rendre compte de son activité.
Obligation de fidélité : Ne pas nuire aux intérêts de l'entreprise (interdiction de la concurrence déloyale).
Respecter les règles de l’entreprise et les instructions de leur entreprise, dans la mesure où elles sont légales et non abusives.
Protection des employés en Suisse
La protection des employés en Suisse est assurée par le CO, la LTr et des lois spécifiques, offrant des garanties importantes aux travailleurs.
Protection contre la discrimination et le harcèlement : Les entreprises doivent prendre des mesures pour prévenir ce type d'abus. Les victimes ont le droit de déposer une plainte auprès des autorités ou des commissions d'experts.
Protection contre le licenciement abusif : L'absence de justification pour une résiliation ordinaire ne rend pas le licenciement abusif, sauf si celui-ci contrevient à des motifs expressément interdits (état de santé non fautif, service militaire, maternité, etc.).
Protection en cas de maladie ou d'accident : L'employeur est tenu de continuer à verser le salaire pendant une durée limitée (selon les échelles de Berne, Zurich ou Bâle, très utilisées dans les cantons), après la fin du délai d'essai, si le travailleur est empêché de travailler sans faute de sa part.
Règlement des conflits en Suisse
Les conflits entre employeurs et employés en Suisse sont fréquents et il existe plusieurs voies pour les régler, privilégiant souvent la rapidité et la conciliation.
Solution amiable : L'employeur et l'employé doivent toujours essayer de résoudre les conflits de manière amiable, souvent par un dialogue interne ou via les Ressources Humaines.
Médiation ou Arbitrage : Des professionnels (médiateurs) ou des commissions paritaires (dans le cadre d'une CCT) peuvent intervenir pour trouver un compromis avant d'aller en justice.
Recours à la Justice (Tribunal des Prud'hommes) : En dernier recours, les employés ont le droit de recourir à la justice pour résoudre un conflit. Les procédures devant le Tribunal des Prud'hommes sont souvent gratuites ou peu coûteuses en première instance pour les salariés.